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L'Afrique d'abord ! Quand François Mitterrand voulait sauver l'Empire français Thomas DeltombeAfrique sous-tutelle

Un livre passionnant : L’Afrique d’abord ! Quand François Mitterrand voulait sauver l’Empire français. Thomas Deltombe nous rappelle le passé trouble d’un Mitterrand fervent colonialiste qui tenta longtemps de faire oublier cette période de son histoire de jeune et ambitieux politicard. L’auteur dès son introduction livre l’essentiel de son propos.

Mitterrand « avait participé à l’aggravation de la guerre [en Algérie] en acceptant d’envoyer à la guillotine [refus de grâce] des dizaines de militants algériens ». Quant à l’Afrique subsaharienne, Mitterrand « n’avait pas pour objectif d’émanciper les peuples dominés […] mais de sauver […] ce qui pouvait l’être du projet impérial ».

Et d’ajouter, que « l’objectif [était] moins la libération des opprimés que l’humanisation de l’oppression. En bref, malgré un propos jugé quelquefois comme libéral, le Mitterrand des années 1950 « était davantage un « re-colonisateur »qu’un décolonisateur prêt à agir sur « deux fronts, la répression et la réforme » (toute relative).

Le livre nous invite à mieux cerner Mitterrand comme un précurseur et un promoteur de ce qu’on appellera la Françafrique. Projet néocolonial bien servi par des tractations parisiennes et par quelques vassaux locaux, dont le richissime Houphouët-Boigny, futur président de la Côte d’Ivoire.

Mitterrand dans les affaires africaines aime à se donner le beau rôle. Il réitérera lorsqu’il tentera dans les années 1950 de relancer et « libéraliser » les protectorats du Maroc et de Tunisie. Le libertairesoulignait d’ailleurs (p.158) qu’il avait de « petites idées dans la tête » et veut maintenant « nous faire croire, sans rire, que ces idées sont humanitaires ».

Pour lui, « l’Algérie, c’est la France » et Le libertaireencore, dès 1954, dénonce « les supplices effroyables subis par des milliers d’Algériens ».

Pour Deltombe, il est clair que Mitterrand a « été un rouage essentiel de l’engrenage terrible » qui organisa « le transfert graduel du pouvoir civil à l’autorité militaire, à l’instauration […] d’un régime d’exception de nature dictatorial ».

En bref, il s’agissait, de facto, pour Mitterrand et toute une partie des « élites » politiques de l’époque de remplacer un colonialisme par un autre, en usant sans retenue du bâton et parfois d’une carotte au goût amer.

Avec De Gaule par la suite, il contribua à maintenir un « empire invisible » et une « indépendance de façade ». Sans compter son ultime mystification, se faire passer pour un anticolonialiste de toujours dans les années 1960.

Deltombe T., 2024,L’Afrique d’abord ! Quand François Mitterrand voulait sauver l’Empire français, Paris, La Découverte.

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